Les traces se lisent partout. Une cheminée endormie dont le sommet est encore noirci, une friche de pierres et de briques émergeant de la végétation… Et parfois, des amas noirâtres tachant le calcaire blanc, auxquels le visiteur ne prête pas forcément attention tant le paysage alentour vaut la carte postale. Fut un temps pas si lointain où le parc national des Calanques, joyau de nature désormais surprotégé aux portes sud de Marseille, était une terre d’industries, option chimie et métallurgie. Un passé certes révolu, mais qui continue sourdement à imprégner ses sols de plomb et autres métaux lourds comme à souiller ses eaux turquoise. Après des décennies de prise de tête, entre état des lieux sanitaire pourtant sans appel et mille-feuille de complexités techniques et environnementales, l’Etat semble enfin avoir résolu le puzzle et s’apprête à engager, dès 2024, un vaste programme de dépollution, ou plutôt de mise en sécurité d’une vingtaine de sites de la Madrague à Callelongue, en plein territoire du parc national.

C’est au début du XIXe siècle que les calanques accueillent les premières usines. La zone, située alors à quelques kilomètres de la ville, fait figure de candidat idéal pour les autorités qui veulent, déjà, mettre à distance les cheminées aux effluves toxiques. «A l’époque, c’était un bout du monde, un lieu de relégation pour les industries les plus polluantes», résume Xavier Daumalin, professeur d’histoire contemporaine à l’université d’Aix-Marseille, qui