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Libération
Etats-Unis

Monsanto condamné à une amende de 857 millions de dollars pour l’exposition d’une école à des polluants éternels

La firme agrochimique américaine a été condamnée à verser d’énormes dommages et intérêts à des élèves et ex-parents d’élèves d’une école exposés à des polychlorobiphényles, polluants dits «éternels», dans le nord-ouest américain.
Les PCB, polluants persistants, étaient notamment utilisés dans les transformateurs électriques et destinés à prévenir le risque d’incendie. (Michael B. Thomas/AFP)
publié le 19 décembre 2023 à 14h59

Un énième revers judiciaire pour Monsanto, assorti d’une nouvelle amende record. Le géant américain de l’agrochimie, filiale du géant allemand Bayer, a été condamné lundi 18 décembre au soir à verser 857 millions de dollars (783 millions d’euros) de dommages et intérêts à des bénévoles d’une école de l’Etat de Washington, dans le nord-ouest américain, exposés à des produits chimiques dangereux. Ces cinq anciens étudiants et deux ex-parents d’élèves avaient saisi la justice, affirmant que leur exposition à des PCB (polychlorobiphényles) contenus dans les éclairages leur avait causé des problèmes de santé. Ce produit chimique d’industrie, à la fois très toxique, polluant et persistant, est interdit en France depuis 1987.

Monsanto a indiqué sa volonté de faire appel de cette décision, comme il l’a fait dans d’autres affaires relatives à la même école, le Sky Valley Education Center à Monroe. Plusieurs décisions avaient ainsi déjà été rendues concernant d’autres professeurs, étudiants et parents de cet établissement, avec plusieurs centaines de millions de dollars d’indemnités à la clé.

Les autorités de l’école régulièrement alertées

Le groupe «n’a jamais averti qui que ce soit que [les PCB] dureraient plus longtemps que les installations dans lesquelles ils étaient installés», a déploré Felix Luna, avocat des sept demandeurs, lors de sa plaidoirie au procès. «Ils n’ont jamais prévenu que lorsqu’ils pénètrent dans l’organisme, ils y restent pour la vie, qu’ils sont neurotoxiques, […] un danger», a-t-il poursuivi, selon la retranscription des débats.

A rebours de cette accusation, l’entreprise a, à plusieurs reprises, rappelé avoir cessé la production de ces polluants organiques persistants, utilisés dans les transformateurs électriques et destinés à prévenir le risque d’incendie, depuis 1977. Soit avant leur interdiction par le gouvernement américain en 1979. Lors du procès, la compagnie agrochimique américaine a aussi insisté sur le fait que les autorités de l’école avaient été régulièrement alertées, dès les années 90, sur la nécessité de remplacer l’éclairage.

Le groupe d’agrochimie fait face à d’autres actions en justice liées aux effets du polychlorobiphényle (PCB), mais a rappelé avoir déjà été mis hors de cause dans plusieurs dossiers. Elle a notamment déboursé 820 millions de dollars pour des contentieux juridiques liés à ce polluant éternel.

Nocivité du glyphosate toujours contestée

Racheté en 2018 par Bayer, moyennant 63 milliards de dollars, Monsanto a aussi été condamné plusieurs fois à indemniser des personnes qui ont été en contact avec le désherbant controversé Roundup, à base de glyphosate. Mi-novembre, le jury d’un tribunal du Missouri avait infligé à la firme 1,5 milliard de dollars de dommages et intérêts au bénéfice de trois Américains qui avaient imputé leur lymphome non hodgkinien, un cancer du système immunitaire, à des années d’utilisation du désherbant. Le groupe a également fait appel de cette condamnation et conteste la nocivité du glyphosate, malgré son classement en 2015 en tant que «cancérogène probable» par le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé. A la mi-novembre, l’Union européenne a elle aussi annoncé laisser le champ libre au glyphosate pour encore une décennie.

Selon Bayer, 113 000 des quelque 165 000 procédures entamées contre Monsanto et liées au désherbant ont été résolues ou déclarées irrecevables à ce jour. En juin 2020, le géant pharmaceutique et biotechnologique avait annoncé avoir conclu un accord amiable couvrant, selon l’entreprise, environ 75 % des 125 000 actions alors en cours pour somme totale comprise entre 10,1 et 10,9 milliards de dollars. Une enveloppe aujourd’hui révisée à plus de 16 milliards de dollars pour le groupe, dont la réputation ne cesse de s’effondrer.