Une petite minorité de sites industriels sont à l’origine de l’essentiel des rejets de Pfas, ou «polluants éternels», dans les eaux françaises. «5,4 % d’industries sont responsables de plus de 99 % de toutes les émissions» de Pfas «vers le milieu naturel ou une station d’épuration urbaine», dévoile la toxicologue Pauline Cervan, de l’ONG Générations Futures, ce mardi 1er avril.
Ces 146 établissements rejettent plus de 1 gramme de Pfas par jour ou ont des rejets très concentrés (avec plus de 25 microgrammes par litre. L’ONG épingle tout particulièrement treize très mauvais élèves émettant plus de 25 grammes par jour ou ayant des rejets supérieurs à 200 microgrammes de Pfas par litre), sommés de «prendre des mesures immédiates pour stopper leurs émissions», ce que certains ont déjà fait.
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Dans le trio de tête des super-émetteurs de Pfas, on trouve l’usine BASF de Saint-Aubin-lès-Elbeuf, au sud de Rouen, et l’usine Solvay de Salindres, dans le Gard, toutes deux déjà sous les radars des autorités et très émettrices d’acide trifluoroacétique, un Pfas non réglementé à ce stade mais dont la toxicité est en cours d’évaluation par l’Anses. Et un industriel moins connu, Finorga, à Mourenx (Pyrénées-Atlantiques), qui produit des principes actifs pharmaceutiques.
Cette concentration des émissions dans un petit nombre d’usines est «un peu inquiétante vis-à-vis des zones riveraines qui sont […] ultracontaminées», commente Pauline Cervan, notant toutefois que «des actions assez ciblées peuvent rapidement être mises en place et aboutir à des mesures efficaces pour réduire drastiquement les émissions».
Données publiques
Pour parvenir à ces résultats, l’association a épluché les données publiques mises à disposition par les Directions régionales de l’environnement au 25 mars, issues des relevés de 70 % des établissements concernés. Car, depuis un arrêté de juin 2023, des milliers de sites industriels susceptibles d’utiliser des Pfas sont tenus de réaliser une campagne «d’identification et d’analyse» de leurs rejets de ces substances dans l’eau.
Quasi indestructibles, les substances per- et polyfluoroalkylées ou Pfas, qui regroupent des milliers de molécules, s’accumulent avec le temps dans les eaux mais aussi l’air, la terre, la nourriture et jusqu’au corps humain, d’où leur surnom de polluants «éternels».
Depuis des mois, l’ONG Générations futures, l’activiste Camille Etienne ou le député les Ecologistes Nicolas Thierry, alertent sur cette bombe sanitaire et environnementale. Leur obstination a déjà payé puisque le 20 février, l’Assemblée nationale a voté, ce jeudi 20 février, un texte porté par cet élu de Gironde qui prévoit notamment d’interdire la fabrication et la vente de certains produits contenant des Pfas. C’est la première fois que la France se dote d’une loi pour protéger la population de ces molécules chimiques.
La semaine dernière, l’académie des sciences a recommandé l’interdiction de l’émission de ces composés dans l’environnement. A Paris, leur détection dans l’eau du robinet, a conduit la régie publique Eau de Paris à porter plainte contre X. Et la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a présenté vendredi 28 mars la feuille de route du gouvernement pour améliorer la qualité de l’eau potable en France.