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Pfas, pesticides, nitrates… Une carte pour savoir ce que contient l’eau de votre robinet

Depuis ce jeudi 16 octobre, un site interactif mis en ligne par les ONG Générations futures et Data for good permet de visualiser les principaux polluants chimiques présents dans l’eau courante en France.

Selon le rapport publié le 16 octobre, 87 % des réseaux de distribution d’eau potable sont conformes à la réglementation. (Jean-Marc Barrere/Hans Lucas. AFP)
ParMargaux Lacroux
Journaliste - Environnement
Publié le 16/10/2025 à 16h04

Fini le casse-tête pour savoir quels polluants se trouvent dans notre eau potable. Ce jeudi 16 octobre, les associations Générations futures et Data for good publient une carte interactive inédite permettant à chacun de visualiser rapidement les derniers résultats des analyses réalisées partout en France.

Sur la plateforme «Dans mon eau», en entrant une adresse précise ou le nom d’une ville en métropole mais aussi dans les territoires d’outre-mer, les données correspondant à cinq catégories de polluants s’affichent, à savoir Pfas (les fameux «polluants éternels»), pesticides, nitrates, CVM (un gaz cancérigène présent dans certaines canalisations en PVC installées avant les années 80) et perchlorates (utilisés sous forme de sels pour des applications militaires, industrielles et agricoles).

Les résultats sont ceux des contrôles sanitaires effectués par les Agences régionales de santé, très difficilement accessibles et lisibles pour le grand public. «Les analyses pour chaque réseau d’eau sont disponibles sur le site du ministère de la Santé mais il est impraticable, il faut lire bulletin par bulletin, c’est très fastidieux et il n’y a pas d’explications sur les taux présents dans l’eau», relève Pauline Cervan, toxicologue de Générations futures. «Nous avons voulu redonner le pouvoir aux citoyens, avec une donnée intelligible et accessible à une fréquence régulière», explique Lou Welgryn, de Data for good, qui réunit des experts de la tech bénévoles.

«La qualité de l’eau est globalement bonne»

Un code couleur permet de rapidement visualiser si l’eau est conforme ou non à la réglementation. Et en sélectionnant les polluants, les taux relevés apparaissent, avec une indication des seuils à ne pas dépasser.

Ce travail visant à récolter des millions de données a demandé près d’un an. Chaque mois, la carte interactive sera actualisée pour intégrer les dernières analyses. Mais l’on peut aussi remonter dans le temps, jusqu’en 2020, pour observer si les pollutions sont chroniques.

Cette carte permet également de faire un état des lieux en France, détaillé dans un rapport publié ce jeudi. «La qualité de l’eau est globalement bonne, 87 % des réseaux de distribution d’eau potable sont conformes à la réglementation et sans dépassement de limites sanitaires», pointe Pauline Cervan. Elle regrette cependant que certains polluants tels que le TFA (un polluant éternel très fréquent dans l’eau) et certains métabolites de pesticides (les molécules issues de leur dégradation) ne soient pas recherchés.

Le nord de la France concentre la majorité des cas de non-conformité, le plus souvent causés par la présence de métabolites. C’est le cas dans 1 348 réseaux d’eau potable, soit environ 5 % d’entre eux. On retrouve fréquemment le chloridazone desphényl, issu d’un pesticide utilisé dans les champs de betteraves mais interdit depuis 2020. A lui seul, il est responsable de 86 % des cas de non-conformité.

«Un dépassement d’une limite de qualité indique une dégradation de la qualité de l’eau mais ne signifie pas forcément qu’il y ait un risque sanitaire», précise Générations futures. Cependant, 3 % des réseaux, soit 709, peuvent faire l’objet de recommandations de restriction de la consommation pour toute ou partie de la population.

Les non-conformités pour cause de forte teneur en nitrates ont, elles, tendance à augmenter dans le temps et sont surtout situées autour de l’Ile-de-France.

Une demande de plus de transparence

Pour les Pfas, les données disponibles sont «globalement rassurantes» car 0,2 % des réseaux dépassent les limites réglementaires recommandées. Néanmoins, l’ONG pointe plusieurs cas particulièrement problématiques, notamment dans les Vosges, à Arrentès-de-Corcieux, où l’eau du robinet vient d’être interdite à la consommation car la concentration totale des 20 principaux polluants éternels est sept fois supérieure à la norme (0,1 microgramme par litre). Cette forte contamination serait due à l’épandage de boues de station d’épuration.

Après ce premier bilan, les deux associations demandent via une pétition en ligne «une surveillance renforcée de la qualité de l’eau potable», en élargissant la liste des métabolites recherchés, ainsi que davantage de transparence sur les analyses réalisées et une protection accrue de la ressource en eau. Générations futures précise également que «l’alimentation solide est la principale source d’exposition à de nombreux polluants dont les pesticides, nitrates et Pfas». Elle encourage à choisir une alimentation à base de produits biologiques.