Encore un géant de la chimie poursuivi en justice, cette fois en Europe. Ce jeudi 19 octobre, les autorités néerlandaises ont ouvert une enquête criminelle sur l’entreprise Dupont et sa filiale Chemours, qui détient la marque Teflon. Ils sont accusés d’avoir pollué l’environnement avec des «polluants éternels» néfastes pour la santé. En cause, les substances per et polyfluoroalkylés, un mot bien complexe mieux connu sous l’acronyme «PFAS», qui désigne un composé aux propriétés antiadhésives, résistantes aux fortes chaleurs et imperméables.
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La procédure néerlandaise a été lancée par 2 400 personnes qui se sont unies contre le chimiste et ses PFAS massivement présentes dans des objets de la vie courante : poêles en Teflon, emballages alimentaires, textiles, automobiles… Au cœur de l’enquête, on retrouve le perfluoro-octanoïque, un composé perfluoré très persistant dans l’environnement et associé à des cas de cancers, d’infertilité et à des dommages environnementaux. «Nous ne devons pas jouer avec le bien-être, la santé des personnes et l’environnement. Lorsque cela arrive, les patrons en costumes élégants doivent répondre à la loi», a commenté Me Bénédicte Ficq, qui a porté le recours collectif des quelque 2 400 plaignants.
L’entreprise assure «coopérer pleinement» à l’enquête
Portant sur une période courant de 1962 à 2012, l’enquête devrait durer un an et sera «très complexe, tant sur le plan factuel que juridique» selon les autorités. La responsabilité civile de l’entreprise n’est pas la seule en cause, car «nous examinerons également si les dirigeants de l’entreprise ont une quelconque responsabilité pénale», ont indiqué les procureurs dans un communiqué.
Du côté des mis en cause, un porte-parole de Chemours a déclaré à l’agence de presse locale ANP que la société «coopérerait pleinement» à l’enquête, et qu’elle s’efforçait «constamment d’améliorer notre processus de production afin de réduire davantage l’impact sur notre environnement».
Critique
Ce n’est pas la première fois que Chemours est sous le feu des projecteurs. En juin, l’émission télévisée néerlandaise d’investigation Zembla dévoilait que l’entreprise connaissait il y a trente ans déjà les graves pollutions des eaux sous son usine et dans ses environs au PFAS, et ses conséquences toxiques et cancérigènes. Dupont était par ailleurs déjà au cœur d’un bras de fer judiciaire dans les années 2000 aux Etats-Unis, qu’elle a perdu en 2016, pour la pollution de milieu naturels. L’affaire a été popularisée avec son adaptation en film, Dark Waters de Todd Haynes. Pour Me Ficq, cette nouvelle affaire doit servir d’«avertissement» aux autres entreprises qui pourraient être concernées.