Pas une côte de métropole n’est épargnée, pas même celles éloignées de sources de pollution, comme l’île d’Ouessant, au large du Finistère. Toutes sont contaminées par des substances pharmaceutiques et des pesticides retrouvés dans des mollusques et de l’eau de mer, indique une étude publiée mercredi 15 octobre par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer).
Dans le cadre du projet Emergent’Sea, les scientifiques ont analysé plus de 11 300 résultats issus de prélèvements réalisés entre 2021 et 2023, de la baie de Somme à la Corse, sur des mollusques (huîtres, moules) ou dans l’eau de mer.
Les trois quarts (77 %) des substances recherchées ont pu être mesurées au moins une fois dans l’eau de mer. Dans les mollusques, 65 % des substances recherchées ont été quantifiées au moins une fois, selon le rapport dévoilé mercredi par le journal le Monde. En moyenne, 15 substances ont été mesurées par point de suivi dans l’eau de mer et jusqu’à 28 substances pour certaines zones du littoral. Dans les mollusques, 10 substances en moyenne ont été retrouvées.
Interview
«Tous les points échantillonnés présentent des contaminations», a souligné à l’AFP Isabelle Amouroux, responsable de l’unité Contamination chimique des écosystèmes marins à l’Ifremer. «C’est la première fois qu’une campagne d’une telle ampleur est réalisée au niveau du littoral : ça nous donne une vision générale de la contamination sur l’ensemble du littoral, pour plus d’une centaine de substances», a-t-elle ajouté.
Les scientifiques ont retrouvé des traces de contamination jusque sur la petite île d’Ouessant, au large de la pointe bretonne, pourtant éloignée des estuaires déversant les polluants issus du continent. Jusqu’à deux substances pharmaceutiques et quinze pesticides ont été mesurés sur le littoral de cette île.
Effets cocktails
Dans l’eau de mer, les matières le plus souvent retrouvées sont des herbicides et des substances pharmaceutiques, comme le paracétamol, des métabolites du métolachlore (un désherbant) ou l’atrazine, un herbicide redoutable pour la santé, interdit depuis une vingtaine d’années en Europe. Dans les mollusques, la contamination est surtout issue d’herbicides et de produits antifouling (peinture antisouillure pour les coques de bateaux).
Il reste désormais à définir des seuils d’effets pour «pouvoir interpréter ces données» et évaluer «s’il existe un risque pour les écosystèmes marins», a précisé Isabelle Amouroux, en soulignant qu’il existe également «des effets cocktails difficiles à appréhender».
Financé par l’Office français de la biodiversité, le projet Emergent’Sea a été mené par des scientifiques de l’Ifremer avec l’unité mixte de recherche du CNRS Epoc, à l’université de Bordeaux.