Une élection cruciale pour la planète. Le résultat de la présidentielle des Etats-Unis, qui se tient le 5 novembre 2024, pourrait bien être décisif pour la trajectoire climatique du pays. Le scrutin devrait à nouveau opposer le président sortant démocrate Joe Biden au milliardaire républicain Donald Trump, tous deux grands favoris de leurs primaires respectives en cours. Si le premier tente depuis trois ans de mener une politique environnementale plus ambitieuse pour les Etats-Unis, le second pourrait bien anéantir tous ces efforts. Selon les projections du site consacré au réchauffement climatique Carbon Brief publiées ce mercredi 6 mars, une victoire de Donald Trump entraînerait une augmentation de 4 milliards de tonnes de plus de gaz à effet de serre (GES) que Joe Biden des émissions américaines.
Les Etats-Unis ont un objectif, celui de réduire de 50 % à 52 % les émissions de gaz à effet de serre américaines d’ici à 2030 par rapport à 2005. Cette échéance, mise en place par Joe Biden lors de son entrée en fonction début 2021, permet aux Etats-Unis de s’engager sérieusement dans le cadre de l’Accord de Paris, qui vise à limiter le réchauffement global de la planète à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. A partir de ce constat, Carbon Brief a envisagé deux scénarios, «Biden» et «Trump», et estimé l’évolution des émissions polluantes du pays en fonction des politiques climatiques prônées par les deux candidats. Résultat, «dans le scénario Trump, les émissions annuelles de gaz à effet de serre des Etats-Unis seraient supérieures d’environ 1 GtCO2 [1 milliard de tonnes d’équivalent carbone, ndlr] par rapport au scénario Biden».
«Forer, bébé, forer»
Tout se jouera dans le choix des politiques climatiques prônées par les deux adversaires. Donald Trump, lui, n’a jamais caché son ambition d’annuler l’ensemble des mesures environnementales mises en place par Joe Biden, comme il l’a fait au cours de son premier mandat avec celles de Barack Obama. La plus mémorable de ses erreurs étant la sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris en 2020, que Joe Biden s’est empressé de rattraper en réintégrant le traité l’année suivante. Pour son second mandat, le républicain promet de s’attaquer à l’énorme plan climat de 420 milliards de dollars de Joe Biden, l’Inflation Reduction Act (IRA), d’investir davantage dans les énergies fossiles et de supprimer les subventions qui encouragent l’achat d’un véhicule électrique.
Si Carbon Brief prend en compte tous ces éléments pour son analyse, le site tient à rappeler que de nombreuses incertitudes demeurent quant aux conséquences d’un second mandat de Donald Trump sur les émissions de GES des Etats-Unis. L’impact du républicain pourrait bien être surestimé car «certaines des mesures environnementales de Joe Biden pourraient bien s’avérer difficiles à démanteler». Mais il pourrait se révéler sous-estimé : l’analyse ne prend pas en compte les éventuelles nouvelles politiques de soutien au développement des énergies fossiles que promeut Donald Trump, qui ne voit dans l’extraction et la combustion du pétrole qu’une source de revenus supplémentaires. Lors d’une réunion publique en janvier, le candidat à la primaire républicaine scandait : «Nous allons forer, bébé, forer.» Ce qui augmenterait probablement les émissions américaines.
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Quoi qu’il en soit, les conclusions de Carbon Brief sont sans équivoque : «Un second mandat de Donald Trump, qui parviendrait à démanteler les politiques climatiques de Joe Biden, mettrait probablement fin aux espoirs mondiaux de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C.» Les Etats-Unis ont une influence colossale sur la pollution mondiale : le pays est le deuxième plus gros émetteur du monde, après la Chine.
Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre n’auraient donc quasiment aucune chance d’être atteints sous une ère trumpiste. Mais côté démocrate, rien n’est encore gagné. L’analyse de Carbon Brief projette une diminution de 28 % des GES d’ici à 2030 sous Trump, contre 43 % sous Biden, loin, dans les deux cas, de l’objectif affiché de 50 % à 52 %. «Les objectifs climatiques de Joe Biden pour les Etats-Unis en 2030 ne seront pas atteints si de nouvelles mesures politiques ne sont pas prises après les prochaines élections», conclut le site britannique. En cas de réélection, de nombreuses contraintes pourraient barrer la route de l’actuel président : son parti doit obtenir le contrôle de la Chambre des représentants et du Sénat afin d’avoir les coudées franches pour mener à bien une politique climatique ambitieuse.