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Pollution

Qualité de l’air : à Paris, la piétonnisation des rues aux abords des écoles fait ses preuves

La concentration en dioxyde d’azote a diminué de 25 % entre 2021 et 2023 à proximité de l’école Saint-Merri, dans le IVe arrondissement, d’après une étude de la mairie. Une nette amélioration permise par le dispositif «rue aux écoles» et sa volonté de réduire le trafic automobile.
A l'établissement Saint-Merri, en 2019, devant laquelle une «rue aux écoles» a été créée l'année suivante. (Chau-Cuong Lê/Chau-Cuong Lê)
publié le 18 décembre 2023 à 18h19

Les 500 élèves de maternelle et de primaire de l’école parisienne Saint-Merri (IVe) peuvent souffler : ils respirent un air (en partie) plus propre. D’après une étude de la Ville de Paris, dévoilée par le Parisien ce lundi 18 décembre, la concentration en dioxyde d’azote (NO2) - un gaz polluant libéré lors des processus de combustion - a en effet diminué de 25 % entre 2021 et 2023 à proximité de cette école élémentaire, dans la rue Saint-Merri. La concentration de NO2 a également baissé de 23 % dans les salles de classe par rapport aux précédents relevés de 2021, selon les mesures réalisées par la direction de la santé publique.

Cette amélioration de la qualité de l’air aux abords de l’établissement a été rendue possible par la mise en place du dispositif «Rues aux écoles», un aménagement urbain lancé par la ville de Paris depuis 2020. Ce dernier se traduit par une piétonnisation des voies, voire une végétalisation des rues où se situent des écoles. «L’objectif de ce plan est d’une part de stopper la circulation des voitures qui sont devant l’entrée des écoles, donc de diminuer la pollution. En parallèle, nous en profitons pour planter des arbres, débitumer le sol, rafraîchir les rues. D’autre part, l’idée est aussi de protéger les enfants et d’assurer leur sécurité», explique Anne-Claire Boux, adjointe à la maire de Paris en charge de toutes les questions relatives à la santé publique.

Dans la rue du Renard qui jouxte l’établissement, la circulation automobile a alors été réduite à une voie depuis le début de l’année 2023 afin d’intégrer un double sens pour les cyclistes. Et la rue perpendiculaire de Saint-Merri a par ailleurs été piétonnisée. «Notre objectif premier reste la lutte contre la pollution, d’autant plus que les enfants, par leur taille, sont à hauteur des pots d’échappement et donc automatiquement les plus concernés par la quantité de dioxyde d’azote et la mauvaise qualité de l’air qui en résulte», exhorte l’élue écologiste.

Le dioxyde d’azote, un gaz irritant pour les bronches

Le NO2 est en effet l’un des principaux gaz polluants présents dans l’atmosphère. «A Paris, les véhicules thermiques sont responsables de 54 % des émissions de dioxyde d’azote. Sa seconde source d’émission est le chauffage - au gaz, au fioul et au bois -, pour un peu moins de 40 %», détaille Antoine Trouche, ingénieur en charge de la médiation scientifique à AirParif, association de surveillance de la qualité de l’air. Baisser le trafic routier contribue ainsi logiquement à la diminution du polluant dans l’atmosphère.

L’ingénieur se réjouit alors des résultats encourageant de cette étude, puisque le «dioxyde d’azote est un gaz très irritant qui s’attaque aux poumons et à notre système respiratoire». Selon Antoine Trouche, une concentration importante de NO2 «aggrave le risque de survenue de crise d’asthme, leur intensité, les maladies respiratoires chroniques, ou encore le risque de cancer. Et comme l’organisme des enfants est encore en développement, ils sont d’autant plus vulnérables aux émissions de ce gaz».

Au-delà de ses conséquences immédiates, le dioxyde d’azote, connu pour irriter le système respiratoire, peut également entraîner des réactions en chaîne. En se combinant avec de l’ammoniac, un «gaz émis à plus de 70 % par les épandages agricoles dans la région Ile-de-France», il «aboutit à la formation de particules ultrafines qui pénètrent très profondément dans l’organisme humain», ajoute l’ingénieur d’AirParif. Diminuer les concentrations de NO2 et endiguer sa capacité à former d’autres polluants d’autant plus dangereux se révèlent ainsi primordial.

«700 décès prématurés par an à Paris pourraient être évités»

Pour la mairie, le combat contre ce polluant atmosphérique s’initie donc dès la cour d’école. Les résultats dévoilés par l’enquête démontrent que «ça marche, que le dispositif fait partie des solutions qui fonctionnent pour lutter contre la pollution de l’air», estime Anne-Claire Boux. Elle affirme que d’autres études seront menées dans les prochains mois afin d’évaluer plus largement les bénéfices du plan.

Aux abords de l’école Saint-Merri, la concentration moyenne annuelle de dioxyde d’azote approche dorénavant de 24 microgrammes par mètre cube selon le Parisien, alors que la réglementation européenne impose un seuil maximal de 40 microgrammes. Cependant, «700 décès prématurés par an pourraient être évités à Paris si l’on abaissait les niveaux du dioxyde d’azote dans l’air, conformément aux recommandations données par l’OMS, soit 10 microgrammes par mètre cube», soulève Antoine Trouche.

Mais le dispositif ne peut se suffire à lui-même. Tout en saluant cette initiative, élargie à 100 nouvelles rues d’ici à 2026, l’ingénieur de Airparif nuance d’ailleurs : «Les enfants sont exposés à ce polluant dans la cour de l’école, mais aussi à la maison. Pour améliorer la qualité de l’air dans son ensemble, il faudrait diminuer les émissions de NO2 sur l’ensemble du territoire.»