Quinze personnes ont été secourues et six autres sont toujours portées disparues après le naufrage d’un voilier de plaisance survenu dans la nuit de dimanche à lundi près de Palerme, en Sicile. Le corps d’un membre de l’équipage a par ailleurs été retrouvé dans l’épave du voilier. Ce yacht, baptisé Bayesian, a coulé à plus de 50 mètres de profondeur alors qu’il stationnait à environ 700 mètres du port de Porticello, une ville côtière à environ 15 km à l’est de la principale ville sicilienne, ont renseigné les gardes-côtes italiens dans un communiqué. Une violente tempête marine – connue sous le nom de trombe marine et semblable à une colonne d’air et d’eau en rotation – serait à l’origine du naufrage. Libé fait le point sur ce phénomène météorologique.

Elle est l’alter ego aquatique de la tornade terrestre, à la différence qu’elle se forme au-dessus d’une étendue d’eau, et non au niveau des sols. Ainsi, une trombe marine se présente comme un phénomène tourbillonnaire, constitué d’une colonne d’air et d’eau en rotation et à l’allure d’entonnoir. Elle s’enroule ensuite telle une toupie. «Les trombes se forment dans des situations calmes, sans qu’il y ait besoin d’orages forts», à l’inverse des tornades, qui nécessitent quant à elles «la mise en place d’une supercellule, type d’orage particulièrement puissant», explique Météo France.

Les trombes se forment alors lorsqu’une masse d’air froid en altitude entre en contact avec des eaux plus chaudes. Une grande différence entre la température de l’eau et celle de l’air, adossée à des vents changeant rapidement de vitesse et de directions, crée alors toutes les conditions pour donner naissance à ce phénomène.

«Les trombes se rencontrent sous les cumulus ou sous les cumulonimbus dans certaines conditions d’instabilité et de cisaillement», détaille aussi Keraunos, l’observatoire français des tornades et orages violents. En balayant l’eau, la trombe marine forme également à sa base un «buisson», un amas constitué de gouttelettes d’eau soulevées de la surface de la mer, note de son côté l’Organisation météorologique mondiale (OMM).

Une trombe marine est ordinairement moins puissante que la tornade, sa cousine terrestre, explique Keraunos, notamment parce que son diamètre est moins important. Aussi, même si le tourbillon peut atteindre une vitesse de 100 km/h, il s’agit d’une vitesse bien inférieure aux 400 km/h que peuvent atteindre les tornades terrestres.

«Les trombes marines sont spectaculaires mais elles sont très localisées et donc peu dangereuses. Il peut même arriver qu’elles fassent du sur-place», rassure en outre Aymeric Spiga, maître de conférences à l’université de la Sorbonne et chercheur au laboratoire de météorologie dynamique (LMD), dans une interview au Huffington Post. «Pour [les personnes] qui se trouvent au beau milieu de l’eau, comme pour le personnel d’un navire, c’est extrêmement risqué. Mais c’est rare», ajoute-t-il.

Par ailleurs, si une trombe parvient à toucher terre sur le littoral, elle se transformera en tornade. Ce phénomène se produit toutefois à de rares occasions uniquement, comme ce fut le cas à Sainte-Maxime en 2013 par exemple, rapporte l’observatoire français des tornades et orages violents. Elle se dissipe dans la plupart des cas.

Comme l’explique l’OMM, les trombes «se manifestent principalement au-dessus des eaux tropicales ou subtropicales». Elles sont ainsi fréquentes en Floride, près des golfes du Mexique ou de la Nouvelle-Angleterre.

Mais ces dernières années, cette manifestation météorologique impressionnante a également été de plus en plus observée en Europe. Courant août, de nombreuses trombes marines ont ainsi été aperçues de l’Espagne à l’Italie, en passant par la Turquie. Elles sont visibles à la fois en mer Méditerranée, mais aussi sur des lacs : ce dimanche, une trombe a été vue sur le lac Léman, en Suisse. Ce phénomène est en effet courant à la fin de l’été et à l’automne dans ces zones, en raison du contraste de température entre l’air et l’eau.

Les conditions orageuses de ces derniers jours dans la zone au sud de l’Europe ont fait naître une masse d’air froid au-dessus de la mer Méditerranée, qui se trouve actuellement en ébullition. Jeudi 15 août, les eaux de la Méditerranée ont ainsi battu leur record de température médiane quotidienne à la surface de la mer : 28,9 °C. Au total, depuis début juillet, la température de l’eau a grimpé de 6°C sur la Côte d’Azur. Un contraste de température propice aux trombes marines.

Et même si aucun lien de causalité entre intensification des trombes marines et changement climatique n’a pour l’instant été établi, de nombreux chercheurs soupçonnent le fait que la fréquence et l’intensité des orages, trombes marines et ouragans, augmentent et redoublent d’intensité à cause du réchauffement.

Mise à jour : le 23 août à 14h52, avec plus de précisions quant au lien entre trombe marine et réchauffement climatique