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Roundup : Bayer-Monsanto se prépare à perdre de nouveaux procès liés au glyphosate

Jeudi, un nouveau procès s’est ouvert en Californie, où une Américaine de 70 ans accuse la multinationale productrice de l’herbicide Roundup d’être à l’origine de son cancer.
FILE PHOTO: Bayer unit Monsanto Co's Roundup is shown for sale in Encinitas, California, U.S., June 26, 2017. REUTERS/Mike Blake/File Photo (Mike Blake/REUTERS)
par Elena Pougin
publié le 8 août 2021 à 14h53

Depuis le rachat en 2018 de la firme américaine Monsanto, productrice du célèbre herbicide Roundup, le géant Bayer a été confronté à de nombreux litiges accusant le produit d’être dangereux pour la santé et même cancérigène.

Ce jeudi, un nouveau procès s’est ouvert en Californie. La plaignante Donnetta Stephens, âgée de 70 ans, estime avoir contracté un type de cancer appelé lymphome non hodgkinien après avoir utilisé du Roundup pendant environ trente ans. Ce procès est le premier concernant Bayer et le glyphosate depuis le début de la pandémie de Covid-19, qui a ralenti les procédures judiciaires.

«Risque accru de lymphomes»

Donnetta Stephens a porté plainte juste après que le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), lié à l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a classé le glyphosate comme «cancérogène probable» pour les humains et les animaux en mars 2015, mais aussi toxique pour la reproduction, génotoxique (qui provoque des modifications délétères du génome), et potentiellement perturbateur endocrinien. Fin juin, en France, l’Inserm confirmait dans un rapport «l’existence d’un risque accru de lymphomes non hodgkiniens [cancers du système immunitaire, ndlr] avec une présomption moyenne de lien». Ce que Bayer continue de nier.

Comme les 125 000 utres plaignants qui se sont manifestés à la suite de cette classification, Donnetta Stephens demande un dédommagement pour la dégradation de son état de santé. Un de ses avocats avance notamment que Bayer a bien conscience des risques cancérigènes du Roundup.

Pour rassurer ses actionnaires, l’entreprise allemande veut se montrer préparée pour ce procès et les suivants : la multinationale a relayé dans un communiqué la semaine dernière avoir mis de côté 4,5 milliards de dollars de provision dans le cas où la justice ne trancherait pas en sa faveur.

Des milliards d’euros de dédommagement

En parallèle, la multinationale espère obtenir gain de cause dans une autre procédure, présentée elle devant la Cour suprême. L’idée serait de pouvoir fixer systématiquement dans tous les procès un montant de «compensations prédéterminées» aux «individus éligibles» qui ont utilisé du Roundup et développés un lymphome non hodgkinien pendant les quinze prochaines années. Cela permettrait à Bayer de limiter les pertes. Le groupe dit avoir «de bonnes chances» et «des arguments solides» pour remporter cette affaire dans ledit communiqué.

Deux tiers des plaintes du même genre ont pour l’instant été réglées à l’amiable par Bayer pour la modique somme de 12 milliards de dollars, mais depuis, les trois derniers litiges en date ont été perdus, coûtant à la firme 50 millions de dollars pour chaque victime. Cela alors que Bayer a racheté Monsanto 63 milliards de dollars en 2018... Malgré le succès de l’agrochimiste dans ses autres secteurs d’activité (pharmacie, agrochimie), les investisseurs de Bayer s’inquiètent face à ces pertes colossales.

La firme a par ailleurs envoyé un signal qui peut sembler contradictoire fin juillet, en annonçant changer la formulation de l’herbicide pour les produits vendus pour particuliers aux Etats-Unis dès 2023 afin d’éviter que les poursuites ne se multiplient davantage. Mais il n’est pas envisagé qu’il soit retiré de ses branches professionnelles et agriculture. Ni au Canada, où cinq demandes de recours collectif ont pourtant été déposées, comme le rapporte Radio-Canada.