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Libération
Reportage

Sécheresse : dans les Pyrénées-Orientales, péril en la forêt

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Les journées du vivant et de la Terre à Rouendossier
Malgré les récentes pluies, les hêtres de la réserve naturelle de la Massane sont victimes d’une mortalité alarmante après trois ans de déficit de précipitations. Le changement climatique percute de plein fouet cet écrin de biodiversité qui est préservé de toute activité humaine depuis cent cinquante ans.
Un hêtre mort dans la hêtraie de la forêt de Massane, le 18 octobre 2024. Dite en libre évolution, elle fait partie des 40 dernières vieilles forêts du bassin méditerranéen. (David Richard/Transit.Libération)
publié le 16 novembre 2024 à 9h50

De longues branches tapissent le sol riche en humus et se mêlent aux racines claires des hêtres centenaires. En silence, une armée de coléoptères grignote le bois mort sous un dense couvert forestier. Entrer dans la réserve naturelle de la Massane, sur les hauteurs d’Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), c’est découvrir un joyau à l’état brut. Depuis cent cinquante ans, cette forêt est laissée en libre évolution : rien n’est coupé ou ramassé. C’est l’un des rares écosystèmes de ce type préservé de toute exploitation en France, semblable à ce qu’il a pu être il y a des millénaires. Car après la dernière glaciation, les hêtres méditerranéens ont trouvé refuge ici, entre 650 et 1 100 mètres d’altitude, au cœur d’une vallée pyrénéenne. Cette oasis perchée a perduré, tandis que les environs se sont transformés en maquis.

Chaque automne, Jean-André Magdalou, chargé de mission scientifique de la réserve naturelle nationale, parcourt les 28 hectares de cet écrin inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco pour ausculter l’état de santé des arbres. Sur sa tablette, les 8 000 hêtres sont cartographiés très précisément. Mais cette année encore, son parcours est jonché d’arbres zombies.

A peine entré dans la forêt, en cette mi-octobre, il saisit des feuilles brunes recroquevillées sur une branche : «Voilà, ça c’est