Des grosses machines mangent la Terre. C’est flippant. Et la musique zimmeresque qui accompagne ces images dystopiques tournées en Allemagne n’arrange rien. Mais l’installation audiovisuelle de Joanie Lemercier, Slow Violence, n’a rien d’un film de science-fiction. Cette création d’une quinzaine de minutes s’appuie sur des scènes quotidiennes d’extraction du charbon filmées en 2019 dans la mégamine d’Hambach en Allemagne. Une allégorie du désastre écologique en cours qui ouvre avec pugnacité une exposition intello et itinérante sur la création architecturale face aux défis environnementaux du XXIe siècle au Centquatre (XIXe arrondissement de Paris).
Mêlant œuvres d’artistes contemporains (dessins humoristiques de Serge Bloch, blocs bleus modulables de Krijn de Koning) aux côtés de maquettes, vidéos, documents et fragments de projets de l’agence Architecturestudio, «Tracé Bleu» compile en effet des dizaines de projets fidèles à la feuille de route dont s’est dotée l’agence internationale d’architecture et d’urbanisme basée à Paris, en Chine, en Suisse et en Côte-d’Ivoire. Ce «manifeste»déjà exposé à la Biennale de Venise l’an passé, repose sur quelques lignes directrices que les architectes associés de l’agence et leurs collaborateurs se promettent de suivre.
C’est par exemple protéger les écosystèmes, construire de manière plus sobre, penser aux usages d’un bâtiment et à leurs évolutions pour sa durabilité, réinjecter du commun, etc. La méthode, qui souhaite concilier impératifs économiques, promesses sociales et réponses au péril climatique, se déploie aujourd’hui en France dans des projets aussi divers que la «gare frugale» Pablo-Picasso en brique de terre compressée à Bobigny, la future cité judiciaire en bois local et terre crue de Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane ou le parc de logements «Respire» en pleine terre, inspiré des préceptes bioclimatiques, à Montpellier. Du concret qui interpellera les non-initiés.