Marignane, envoyé spécial Le boulanger est inquiet. C'est grave, dit-il. Le FN est passé. Il ne sait pas pourquoi c'est grave, exactement. «Pour l'ambiance», sans doute. Parce que «Marignane est devenue une ville sous le feu de l'actualité». Mais quelque chose cloche, sur le cours Mirabeau. Dans la nuit de dimanche à lundi, on a cassé la vitrine de la parfumerie. Les policiers disent que cela n'a rien à voir, que c'est un casse classique. Pourtant, quelque chose cloche.
Il fait beau, c'est le Midi, les terrasses de café sont fraîches, à l'heure de la mauresque. Mais, au bar du Marché, le garçon dit que l'ambiance est tendue. «Les gens, ici, en parlent peu, ou en rigolant.» Puis il se sauve. En face, Chez Alain, Daniel Simonpieri, nouveau maire de la ville, élu avec 37% des voix, serre des mains, puis s'asseoit. Sur l'autre trottoir, une femme arabe passe, le regarde, lâche à une amie un regard, un juron. «Laisse, laisse. Mépris, ignorance», répond l'autre, comme un mot d'ordre. C'est tout.
Ce vote, dit Simonpieri, «n'est pas une surprise». En 1974, la première élection présidentielle à laquelle se présentait Le Pen, le leader du FN avait recueilli 0,74% des voix au niveau national. Et déjà 4%, à Marignane. L'ancien maire RPR, Laurens Deleuil, avait accompli quarante-huit ans de mandat. S'était déjà allié au FN. C'est ici, à Marignane, qu'avait eu lieu pour la première fois la fête des Bleus Blancs Rouges. «Il y a, sur la ville, quelque 40% de rapatriés d'Algérie», note égal