Leurs patients viennent de pays dont le nom évoque des images de
chaos, de répression, de massacres: Kosovo, Algérie, Kurdistan, Iran. Eux sont médecins, sociologues, psychothérapeutes, habitués au secret professionnel et souhaitent, avant tout, protéger ces gens malades des violences et des tortures passées. A l'association Primo-Levi, spécialisée dans les soins des victimes des persécutions, les thérapeutes ont d'abord espéré que d'autres se chargeraient d'alerter le gouvernement sur le sort injuste fait aux réfugiés. Puis, comme les refus s'accumulaient, ils ont lancé l'idée de cet appel au Premier ministre. «Pour témoigner des souffrances de nos patients», explique l'un d'eux. «Pour que des situations abracadabrantes mais banalisées soient connues du public», souligne un autre. Séquelles. A Primo-Levi, les soignants font confiance à leurs patients. C'est nécessaire pour les aider à renouer les fils de leur histoire, à apprendre à vivre avec ces blessures et, plus tard, à secouer leur déprime et à entamer les démarches pour leurs papiers. C'est donc en médecins ou en psychothérapeutes qu'ils s'alarment des dégâts sur leurs patients de cette logique de la preuve impossible et du soupçon. «Nos malades ont toutes sortes de séquelles physiques et psychiques de torture, par exemple. Ils ont des ennuis rhumatologiques, des fractures, des maux de dos qu'on peut directement relier à des tortures, à des suspensions. Et des troubles psychosomatiques, des ulcères, des troubles du