On y va, même sans les Américains. C'est en substance la position
exprimée par la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne dans la crise du Kosovo. Et c'est une première, qui marquera peut-être la naissance d'une identité européenne de sécurité. Ces trois pays, que les Italiens et d'autres Européens devraient rejoindre, ont promis d'engager des troupes au sol afin de garantir un éventuel accord de paix. Mis devant le fait accompli, les Américains risquent fort de devoir à leur tour envoyer des GI's du côté de Pristina, s'ils veulent garder le contrôle de l'affaire. Comme en Bosnie durant l'été 95, lorsque l'US Army a rejoint les forces françaises et britanniques, afin d'assurer la mise en oeuvre des accords de Dayton.
Cette nouvelle donne européenne a connu ses prémices au sommet franco-britannique de Saint-Malo, début décembre, puis lors de la création d'une force d'extraction de l'Otan basée en Macédoine. Dans la cité corsaire, Tony Blair a reconnu pour la première fois que l'Europe «doit avoir une capacité autonome d'action, appuyée sur des forces militaires crédibles». Marginalisé sur la question de l'euro, Blair ne veut plus s'afficher comme euronégatif. Il fait là un grand pas en avant vers une défense européenne, à la grande joie des Français.
Au même moment, l'Otan discute d'une «force d'extraction» chargée d'assurer la sécurité des vérificateurs de l'OSCE au Kosovo. Les Américains ne sont pas convaincus et, lors d'une réunion à Creil, ils déclinent l'offre d'y participer