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Libération
Éditorial

Mariage de raison

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publié le 26 février 1999 à 23h53

La construction européenne est célébrée à répétition avec un lyrisme

de sous-préfet aux champs. En réalité, depuis quarante ans, les bâtisseurs en question ont gardé les pieds sur terre, voire carrément enfoncés dans la gadoue. De marathon du lait en épopée de l'acier, les murs de Bruxelles n'ont cessé de résonner des coups de gueule et des matoiseries d'un maquignonnage aux dimensions continentales. Cela a provoqué des moqueries auxquelles l'Europe a survécu autant qu'à ses empoignades intestines. Cela devrait pouvoir continuer, même si cette pièce du répertoire montre des signes d'usure.

Un budget européen n'a de sens que s'il procède à une redistribution des ressources disponibles entre les pays membres, par zones géographiques autant que par branches économiques. Il est donc normal qu'un grand pays riche comme l'Allemagne verse plus au pot commun qu'il n'en retire. De même, il est normal qu'un pays où l'agriculture occupe une place telle qu'en France reçoive d'importantes subventions, à partir du moment où on estime nécessaire de soutenir ce secteur. Mais on ne peut faire comme si rien ne s'était passé depuis l'invention du «marché commun» et comme si la participation inégale entre les deux principales économies européennes devait être placée au rayon des acquis intangibles.

A la veille d'une redistribution obligée des cartes, dans cette période spéciale de l'après-euro et de l'avant-extension à l'Est, chaque pays est rappelé à son égoïsme propre et craint pour son portefeu