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Libération
Éditorial

Yehudi Menuhin rejoint Stradivarius. Tsigane.

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publié le 13 mars 1999 à 0h07

«J'ai toujours eu l'âme tsigane», avouait-il. Et, de fait, comme un

Tsigane idéal, Yehudi Menuhin n'avait pas de patrie sinon la musique et les haltes successives et cosmopolites où elle l'appelait. «Citoyen du monde», il ne l'était pas seulement par idéal et conviction d'adulte, mais depuis toujours, depuis son enfance de violoniste prodige et les vagabondages internationaux qui lui assignaient pour seul pays le monde entier. Peu d'hommes auront autant que lui mérité de symboliser l'ouverture à l'autre. Son intérêt pour la culture indienne en est le trait le plus connu, pas le seul (yogi accompli, il lui est arrivé de diriger la Philharmonie de Berlin la tête en bas!).

Ses collaborations fameuses avec le sitariste Ravi Shankar ou le jazzman Stéphane Grappelli, aventures musicales dont il disait avoir beaucoup appris, font ainsi figure de manifeste humaniste contre les cloisonnements identitaires et les a priori hiérarchiques. Il mettait d'ailleurs autant d'enthousiasme à défendre la musique viennoise ­ celle de Lehar plutôt que celle de Schoenberg ­ que le souvenir de Bartok. Et, malgré ses réticences devant la musique contemporaine, il avait fait un effort en leur direction pour se «familiariser avec ce langage».

Les activités extramusicales de Menuhin, ambassadeur de bonne volonté, ont contribué à sa notoriété sans que l'on puisse le soupçonner de l'avoir recherchée. Il était depuis longtemps reconnu comme l'un des très grands violonistes du siècle. Ce qui n'excluait pas une