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Libération
Éditorial

Le pire consensus

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publié le 18 mars 1999 à 0h11

La surmortalité automobile française provoque quelques émois, puis,

année après année, poursuit son dérapage. Sa courbe descendante depuis un quart de siècle cachait mal une arriération persistante en matière de sécurité routière mais permettait néanmoins de se rassurer un peu. C'est fini. Une recrudescence de l'hécatombe ne permet plus de se cacher derrière des voeux pieux. On sait depuis longtemps pourquoi les Français se blessent ou se tuent avec une fréquence anormale sur la route ­ parce qu'ils se permettent de conduire sous l'effet de l'alcool et ne tiennent guère compte des limitations de vitesse. Les raisons pour lesquelles ils s'autorisent de telles choses sont plus incertaines. On évoque une influence «culturelle», ce qui n'avance guère tant qu'on n'a pas défini cette «culture». Certes, en Suisse, les types de conduite s'opposent entre francophones et germanophones, mais, plus latins que nous, les Italiens sont aussi moins chauffards. Comment pénétrer dans les zones obscures d'une conscience collective nationale que balisent d'autres clignotants inquiétants (taux de suicides ou de consommation de psychotropes)?

En réalité, il est à craindre que ce genre d'évocations «culturelles» servent surtout d'adjuvant, tant à la paresse de l'action publique qu'à l'indulgence de l'opinion. L'opprobre social n'accable pas les automobilistes contrevenants. Du coup, les décideurs ont été dissuadés de prendre des mesures contraignantes et impopulaires. L'insécurité est bien plus fac