Il fallait de l'imagination pour se représenter Primakov en homme de
bonne volonté mais, après tout, à la guerre comme à la guerre! Au demeurant, l'indulgence du Russe pour les agressions serbes reste contenue dans les limites assez étroites de son propre intérêt. Le problème n'est donc pas d'avoir pensé employer cet instrument invraisemblable à la tâche improbable de faire entendre raison à la brute de Belgrade. L'inquiétant est plutôt que l'Otan s'est défaussée d'un joker à un moment où tout indiquait qu'elle le ferait en pure perte. La coalition n'a pourtant pas tant de cartes dans son jeu" Les alliés semblent avoir sous-estimé la détermination de Milosevic avant les frappes puis, ayant dû recourir à celles-ci, avoir surestimé à l'avance leur effet sur lui. Les preuves de leur désarroi, on les trouve dans leur conduite plus que dans leurs déclarations. Il était absurde d'annoncer que les frappes se poursuivront longtemps encore et d'envoyer en même temps quelqu'un recueillir à Belgrade un signe de recul qui permette de les interrompre. Au plus charitable, on dira que cette contradiction jetait le doute sur la fermeté des menaces occidentales.
C'est bien ce qu'a compris Milosevic, inutilement mis en mesure de retourner la démarche de Primakov en astuce propagandiste. Ne profite-t-il pas de l'aubaine pour poser ses conditions" à l'interruption de ses crimes? Tout en faisant un clin d'oeil aux pacifistes européens, ne nargue-t-il pas un peu plus les Occidentaux en évoquant une