En dix ans d'exil en France, il s'était refait une vie avec un bon
emploi de maçon et un petit appartement dans la banlieue est, où il vit avec sa femme et ses deux enfants. Mais, maintenant, Hiseni, 33 ans, a décidé de partir combattre. «C'est une obligation morale. Comment pourrais-je dire à mes fils que leur père est resté à l'étranger alors que notre peuple se fait massacrer?», assure le futur combattant.
Un oncle et les amis s'occuperont de faire vivre la famille. Il est parti mercredi avec une quinzaine de camarades pour l'Albanie; de là il ira dans un camp d'entraînement de l'UCK (Armée de libération du Kosovo) dans les montagnes, près de la frontière. Dans un mois, après une formation sommaire, il sera considéré comme opérationnel. «On a longtemps cru que le régime de Milosevic céderait sous la pression du monde; maintenant, on a compris que seule la force paie et que personne n'est prêt à mourir à notre place», explique Hiseni. Il a écrit une courte lettre pour justifier ce choix et appeler d'autres émigrés à faire de même.
Il la lisait dimanche d'un ton posé sur une tribune improvisée, sous les néons de la nef moderne et triste de l'église croate de Paris, qui accueille à l'occasion les réunions de la diaspora kosovar. Le «gouvernement du Kosovo» a décrété la «mobilisation générale» des hommes de 18 à 55 ans. Sur le mur ont été accrochés un drapeau albanais avec l'aigle à deux têtes et une grande affiche montrant un colosse barbu, bardé de cartouchières et mitraillett