Moscou, de notre correspondante.
Pour la première fois depuis le début du conflit, Boris Eltsine a brandi vendredi la menace d'une «implication de la Russie». Une menace très déclamatoire qui traduit la délicate position du pouvoir russe, tiraillé entre le souci de ne pas rompre avec l'Ouest et sa volonté d'amadouer une opposition de plus en plus vindicative. «J'ai dit à l'Otan, aux Américains, aux Allemands: ne nous poussez pas aux hostilités, ou alors il y aura une guerre dans toute l'Europe, peut-être même une guerre mondiale. Et nous sommes contre», a martelé Eltsine en recevant le président de la Douma, le communiste Guennadi Seleznev, de retour de Belgrade. Le matin, il avait proféré la même menace: «La Russie ne s'engagera pas dans le conflit armé sauf si les Américains nous y poussent.» Et il avait enchaîné sur une diatribe contre les Etats-Unis qui «veulent passer aux opérations terrestres, envahir la Yougoslavie et en faire leur protectorat». Le chef de l'Etat, qui bat des records d'impopularité, a voulu amadouer une opinion de plus en plus antiaméricaine. Il entendait aussi couper l'herbe sous le pied des nationalistes et des communistes, en pointe sur la solidarité avec les Serbes. Mais le Président est encore plus préoccupé par la procédure de destitution qui le vise. Le 15 avril, la Douma examinera cinq charges retenues contre lui. La procédure sera enclenchée si l'une d'elles est votée, par exemple celle portant sur la responsabilité d'Eltsine dans la guerre