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Libération

Au vingtième jour des frappes alliées, témoignages sur l'état d'esprit des Serbes. En Serbie, la peur, l'hystérie et la colère. La directrice d'une organisation de défense des droits de l'homme décrit l'éclatement de la société civile.

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publié le 12 avril 1999 à 0h40

Podgorica envoyée spéciale

A Belgrade, «la société civile a disparu». C'est le constat que fait Natacha Kandic, la directrice du Centre pour le droit humanitaire, seule organisation non gouvernementale serbe à ne pas avoir encore mis la clé sous la porte. En douze jours, Natacha Kandic ­ de passage en début de semaine à Podgorica (Monténégro) ­ a subi les bombardements de l'Otan en Serbie, vécu la détresse de Pristina d'où elle a extrait trois de ses collaborateurs albanais et expérimenté l'insouciance de Podgorica, la capitale monténégrine. Aujourd'hui, elle dit avoir eu l'impression, pendant ce court laps de temps, de traverser trois mondes dans ce qui est théoriquement le même pays, la Yougoslavie. «A Belgrade et en Serbie, raconte-t-elle, chacun a peur des bombardements de l'Otan et ignore ce qui se passe au Kosovo. A Pristina et au Kosovo, tout le monde est pour la poursuite des raids et cherche à fuir ou à se cacher. Le Monténégro essaie de se tenir à l'écart et de subsister.»

«Grande tristesse». «Pendant des années, j'ai vu que la Serbie était génératrice de guerre et que rien de bon n'en sortirait», explique la directrice de l'ONG, qui a recueilli des preuves sur les crimes serbes en Bosnie et a ouvert l'an dernier une antenne à Pristina, au Kosovo. «J'ai toujours pensé que tout allait se terminer en Serbie. Et quand les sirènes ont hurlé pour annoncer la première alerte aérienne, j'ai compris qu'il en serait bien ainsi. J'ai ressenti une grande tristesse, car je vois