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Libération
Analyse

L'obsession de la nation homogène.Depuis un siècle, les déplacements de populations redessinent les Balkans.

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publié le 19 avril 1999 à 0h46

«Les déplacements de population ne sont pas la conséquence de la

guerre mais son but», notait en 1995, à la fin de la guerre en Bosnie, Tadeusz Mazowiecki, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme de l'ONU. Tous les camps pratiquèrent cette politique dont les Serbes avaient donné le coup d'envoi. Avec le «nettoyage ethnique» du Kosovo, considéré comme «le berceau de la nation serbe», Milosevic concrétise le projet qu'exprimaient dès 1986 les académiciens de Belgrade dans un Mémorandum qui fut le manifeste de la revanche «grand-serbe» dans une Yougoslavie socialiste agonisante.

Terreur. Au Kosovo comme en Bosnie, les nationalistes veulent créer un espace national homogène d'où les communautés jugées indésirables sont expulsées par la terreur, et les témoignages de leur histoire (monuments, cimetières) détruits. «Si nous perdons cette guerre, ce sera à notre tour de partir», expliquent les Serbes aux Albanais. On projette sur l'autre ses peurs. On lui attribue ses propres intentions. On craint, non sans raison, sa vengeance.

En août 1995, quelque 200 000 Serbes quittèrent la Krajina croate en d'interminables cortèges de tracteurs fuyant la reconquête par les forces de Zagreb. Après les accords de paix de Dayton, les Serbes quittèrent en masse, en février 1996, les banlieues de la capitale bosniaque qui revenaient sous le contrôle des autorités de Sarajevo. Ils partaient pour ne plus jamais revenir, en déterrant leurs morts des cimetières. Ni les appels du gouvern