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Libération
Éditorial

Paradoxe.

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publié le 20 mai 1999 à 1h06

Le premier bilan des 35 heures est sans appel: cette loi ne répond

pas à son objectif initial, une création d'emplois massive et volontariste. Dans les chiffres qu'elle donne, Martine Aubry manie aussi bien l'amalgame que le voeu pieux. Entre les emplois du secteur public (par définition rarement menacés) et ceux «créés ou préservés» par la croissance, il est difficile de mesurer l'impact des accords sur la réduction du temps de travail. Présentée comme la loi emblématique de la gauche plurielle, cet échec sera dur à assumer s'il devait se confirmer. Toutefois, il sera largement atténué par trois vertus indiscutables.

En premier lieu, cette loi permet une modernisation sans précédent de l'appareil de production français: la plupart des négociations en cours se traduisent par l'introduction d'une souplesse impensable il y a quelques années. Incité par une légère duplicité d'Aubry et de Strauss-Kahn, le patronat en profite pour dénoncer les conventions collectives, pour s'attaquer ­ parfois avec une pointilleuse mesquinerie ­ à une myriade d'avantages ou d'usages considérés comme acquis: il réorganise, redistribue, annualise, non sans excès.

Seconde vertu: la restauration d'un dialogue social que l'on croyait moribond, résultat d'une désaffection syndicale et d'un certain autisme patronal. Les discussions en cours vont au-delà de la simple réduction du temps de travail. Les salariés les plus optimistes se prennent à espérer le regain d'une syndicalisation aujourd'hui à marée bas