C'était jour de fête à Cargèse. Un lundi de Pentecôte avec foire à la brocante. Les vendeurs en étaient à remballer leur marchandise. Les heures avaient été bien remplies, et Cargèse, petit port de 800 habitants l'hiver, au nord d'Ajaccio, pouvait clore ses volets. Au bar du Bon Accueil, des motards se tâtaient pour reprendre la route. Plus loin, des joueuses de tennis savouraient leur victoire à un tournoi. Et puis ce fut 20 heures, et le journal télé qui crache l'information: ils ont avoué, ils sont d'ici, du village, et l'un des assassins présumés d'Erignac est en fuite. Son nom n'est pas encore cité, mais les renseignements sont transparents. Un berger, fils d'un ancien député PS. Cargèse a saisi: c'est Yvan Colonna. Dans le village, son nom court aussitôt. A sa fenêtre, une femme a les yeux rougis. Elle pense à Yvan et à son fils, à sa famille, au village, aux amis, à son fils à elle, décédé il y a peu. La femme mêle les émotions, s'excuse de ses pleurs, répète que «c'est impossible», qu'elle n'y croit pas, qu'il faut des preuves, qu'«Yvan est innocent». «Et pourtant, je ne suis pas de son bord», ajoute-t-elle soudain, en sachant que ça n'a pas d'importance, au fond. Maître nageur. Pour elle comme pour tout Cargèse, c'est la fibre villageoise qui joue. Elle l'a vu grandir. Elle se souvient de lui, président de l'association sportive, à entraîner les gamins au foot. De lui, maître nageur pendant plusieurs saisons. De lui, lycéen, qui s'en était pris à des racketteurs q
Reportage
A Cargèse, «c'est comme s'il y avait un mort dans la maison».
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par David DUFRESNE
publié le 26 mai 1999 à 1h11
(mis à jour le 26 mai 1999 à 1h11)
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