Comment concilier modernité et féodalité? La recette n'appartient
pas au domaine public. Mais Hassan II a passé une bonne partie de sa vie à tenter de l'élaborer. Sans qu'on puisse être certain de sa réussite.
Lui-même parfois semblait en douter et convenait, entre deux références à Montaigne, de quelques interrogations. Mais bien vite il se reprenait, en homme de deux cultures celle de Bordeaux où il étudia le droit et ne négligea pas les frasques propres à la vie d'étudiant au-dessus de tout besoin et celle d'une monarchie sans autres limites que celles qu'un être humain peut s'imposer.
Les limites prirent du temps à lui paraître évidentes. Rien ne l'y disposait. Monarque et chef religieux tout-puissant, il avait de son domaine réservé une conception extrêmement extensible: le Maroc était sa propriété, ses habitants étaient ses sujets. Des sujets soumis à son bon vouloir, droit de vie et de mort.
Ces années noires furent longues. Hassan II y gagna une réputation exécrable qui court de l'assassinat de Ben Barka à celui des assassins du chef de son opposition, sans oublier le traitement infligé aux descendants de ses spadassins convaincus de trahison.
Les valeurs du temps cependant ont fini par se rappeler au bon souvenir du monarque. Rien ne prouve que cet homme supérieurement intelligent y ait sacrifié de bon gré. Mais il sut à sa façon se déjuger, sinon réparer. Au point d'apparaître depuis quelques années comme une référence paradoxale dans un Maghreb en proie au fanatism