Exception française oblige: en dix ans, il n'y a que Michel Rocard
qui ait pu, avant Lionel Jospin, rester plus de deux ans à Matignon. Cela participe tout à la fois du caprice des présidents en place et de l'humeur électorale des Français. A force, on finirait presque par trouver surprenant que le même Premier ministre soit toujours à son poste au-delà du mandat fatidique.
En tout cas, cette rentrée politique a montré que la majorité plurielle avait elle-même de la peine à s'installer dans la durée gouvernementale, talonnée par des impatiences et des exigences sociales nouvelles.
Après avoir tâtonné à La Rochelle avec l'évocation un peu hâtive du plein-emploi à l'horizon 2010, trébuché sur France 2 avec un aveu d'impuissance publique mal venu dans le contexte Michelin, le Premier ministre s'est ressaisi, hier, avec une intervention qui tenait lieu de deuxième discours d'investiture. Deux ans après avoir sollicité la confiance de la gauche, il fallait au Premier ministre ressouder un pacte politique qui est son assurance vie. Débité devant les seuls parlementaires de son parti, le catalogue du faisable, du possible et du souhaitable qui devrait marquer cette «deuxième étape» (l'expression n'est plus taboue) est censé satisfaire toute la clientèle de gauche. Mais si Lionel Jospin avait besoin de remettre en perspective son action, c'est aussi que depuis 1997 l'évolution de l'économie et des mentalités a imposé au gouvernement des choix qui n'étaient pas forcément inscrits dans