Claude Breuillot est grand reporter à France Info, partenaire de
Libération pour la couverture du 50e anniversaire de la Chine populaire.
Le vieux camarade Fu Chang a les yeux qui pleurent, mais ce n'est pas à cause du chagrin qui le saisit à chaque fois qu'il se souvient de l'arrivée de la Longue Marche à Yan An en 1935. Fu Chang pleure parce que ses yeux lui font mal et qu'il n'a plus d'enfant pour lui acheter une paire de lunettes. A 82 ans, il vit dans un chambre au rez-de-chaussée d'un immeuble gris. Près de son lit, il y a une cuvette et un transistor: «J'écoute les nouvelles et celles que j'entends ne sont pas très bonnes.» Fu Chang avait 16 ans quand il a rejoint l'armée de Mao: «Les conditions étaient très dures. Je me souviens quand nous avons gravi la montagne de la Neige. Il faisait très froid et le président Mao nous a fait distribuer des vêtements et des couvertures. Il était très souvent près de nous. Il mangeait avec nous. Il n'aurait jamais permis ce qui se passe aujourd'hui.» Le vieil homme parle du chômage et surtout de la corruption. Contre les Japonais, contre les nationalistes chinois et puis en Corée du Nord, Fu Chang s'est battu au nom d'un idéal qu'il sait aujourd'hui battu en brèche: «A l'époque du président Mao, il n'y avait pas tous ces fonctionnaires corrompus. Tout le monde donnait son coeur à la Chine.» Fu Chang ne garde qu'un souvenir approximatif du 1er octobre 1949. Il se rappelle seulement que son Président avait annoncé qu'il renonçait à l