Tant que l'Europe de l'armement restait dans les limbes, les
vibrants appels à élaborer une Europe de la défense avaient toutes les chances d'en rester au stade des voeux pieux. C'est bien pourquoi la fusion annoncée d'Aérospatiale-Matra et de Dasa revêt une importance cruciale: les architectes sortent enfin du virtuel et de l'incantation pour entrer dans le concret et se préoccuper de bâtir ces fondations sans lesquelles rien de solide ne pourra être construit.
Ne nous y trompons pas: l'accord signé hier à Strasbourg procède bien sûr d'une logique industrielle élémentaire, mais il est aussi et surtout le résultat d'une volonté politique qu'on pouvait croire, il y a encore quelques jours, défaillante. Les dirigeants français en ont fait preuve en comprenant enfin que rien ne serait possible, sinon le déclin dans le pré hexagonal, sans renoncer à terme au désengagement de l'Etat au sein d'Aérospatiale. C'est parce qu'ils n'ont pas voulu ou pu y procéder à l'avance, pour des raisons de politique intérieure, que l'Allemagne pourra apparaître comme la mieux lotie à l'issue de l'opération. Ils ne pourront s'en prendre qu'à eux-mêmes. Il n'en demeure pas moins que le choix européen fait par les responsables allemands, qui se sont impliqués tout au long de la négociation, notamment par le truchement de Siegmar Mosdorf, le ministre adjoint à l'Economie, relève, lui aussi, de la même volonté politique de doter l'Union d'une industrie d'armement et aéronautique commune donc cohérent