La guerre que les militaires russes mènent en Tchétchénie n'est pas
la répétition des combats de 1994-1996. Elle représente au contraire un véritable tournant, comparable à ce que la guerre du Golfe a pu être pour l'armée américaine. Les généraux russes ont manifestement tiré les leçons de leurs échecs en Afghanistan (1979-1989) puis en Tchétchénie. Ils ne s'en cachent d'ailleurs pas, faisant explicitement référence aux méthodes et à la doctrine de l'Otan.
Le «choc» et le «feu». Les Russes font la guerre à distance en refusant le combat direct avec les forces tchétchènes. C'est la manière moderne de combattre: au printemps 1991, les armées alliées avaient ainsi écrasé les troupes irakiennes sous un déluge de feu, avant de bousculer ce qu'il en restait. Cette année, les frappes de l'Otan ont fait plier Milosevic, permettant aux troupes d'entrer au Kosovo sans tirer un coup de fusil.
En matière de guerre, «on distingue trois modalités essentielles: le choc, le feu et la manoeuvre», affirme Hervé Coutau-Bégarie, expert en stratégie. Traditionnellement, l'armée russe privilégiait le «choc», c'est-à-dire l'affrontement direct des soldats sur le champ de bataille. Une stratégie qui permit à l'URSS d'écraser l'armée allemande et qui fit trembler l'Alliance atlantique pendant quarante ans. Le «feu», en revanche, c'est écraser l'adversaire à distance en exposant ses hommes le moins possible. Poussé à l'extrême, on arrive au concept américain de «guerre zéro mort». Dans son camp! Pour l