Bruno Rebelle est directeur de Greenpeace-France. Il revient pour
Libération sur le naufrage du pétrolier maltais.
Quelles leçons tirez-vous du naufrage de l'«Erika»?
D'abord, on voit qu'en 1999 nous n'avons toujours pas tiré les leçons du passé. Une grande firme comme TotalFina se permet encore d'affréter un navire vieux de vingt-cinq ans au passé extrêmement lourd, qui aurait déjà été condamné pour des irrégularités en termes de sécurité. TotalFina dit avoir effectué tous les contrôles à Dunkerque. On peut en douter: vingt-quatre heures plus tard, le cargo coulait. Ensuite, on peut noter qu'un certain nombre d'erreurs de gestion du risque ont été commises.
Dès samedi matin, le capitaine de l'Erika avait signalé des problèmes. Plutôt que de lui imposer une escale forcée à Brest, rade en eau calme, les autorités maritimes ont laissé le navire poursuivre sa route. Enfin, on ne peut qu'être choqué par la tiédeur du gouvernement français à dénoncer les pratiques de TotalFina. Peut-être parce que la multinationale française vient de réaliser une fusion «exemplaire» avec Elf, pour devenir le quatrième groupe mondial" Quelle logique dénoncez-vous?
Une logique de productivité industrielle, de compression inexorable des coûts et de quête du bénéfice à tout prix. Sans se soucier de préserver l'environnement, de garantir les conditions de sécurité et d'assurer le minimum en matière de droit social pour l'équipage.
Les compagnies pétrolières vivent dans une logique d'irresponsabilité totale