Il a accédé au pouvoir depuis la salle d'attente. Après une carrière
facilitée du début à la fin par Félix Houphouët-Boigny, qui l'a nommé ambassadeur à Washington à 26 ans, puis ministre de l'Economie au plus fort du «miracle» ivoirien, Henry Konan Bédié est devenu président de l'Assemblée nationale et, à ce titre, l'«héritier constitutionnel» du Père de la nation. Lequel, surnommé «le Vieux», a connu une longévité exceptionnelle à la tête de l'Etat, trente-trois ans, durant lesquels il a enterré tous les prétendants à sa succession. Ceux-ci avaient plus d'ambition, ou plus d'amour-propre, que Bédié, qui est resté treize années à l'affût du pouvoir sur son perchoir, sans broncher et même sans fréquenter les journalistes ou les «barons» du régime, par crainte que son mentor, qui sur la fin n'était qu'une momie aussi irascible que cacochyme, puisse y déceler un empressement indécent.
Résultat: voilà un Président qui avait déjà fait son temps avant même d'exercer le pouvoir. Ayant pris toutes les mauvaises habitudes de l'ancien régime, de la gestion patrimoniale de l'Etat au culte de la personnalité, Bédié y ajoute l'«ivoirité», un concept d'exclusion qui vise le seul challenger qu'il ait jamais trouvé sur sa voie toute tracée, l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara, prétendument burkinabé. Malgré ses postures d'autorité, Bédié, qui se fait appeler «Aimé» par ses courtisans, est un homme faible, peureux. Alors que de nombreux titres de la presse internationale sollicitent la pr