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Libération
Éditorial

Tirs croisés.

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publié le 7 janvier 2000 à 22h06

Il est plus facile de changer de siècle que de changer ses

habitudes. Chacun à sa manière, les partis de droite et les magistrats défendent leurs positions acquises et leur confort menacé en dirigeant des tirs croisés, quoique venus d'horizons opposés, sur le projet de réforme de la justice présenté par la garde des Sceaux. Sous leurs contorsions de langage, il est facile de voir que les premiers, politiciens rompus aux usages troubles de la Ve République, crèvent de nostalgie pour leurs privilèges passés, leur immunité tacite mais fructueuse. Quant aux juges, tout entiers occupés à se projeter dans leur tardive indépendance, ils cherchent surtout à préserver leur cocon protecteur.

On le voit, au XXIe siècle en France, il est encore une idée neuve: celle de responsabilité. L'élection populaire n'équivaut pas à une absolution, ni la toge de magistrat à une indulgence plénière. Mais cela reste difficile à avaler pour ceux qui ont si longuement profité du laxisme français en matière de pratiques démocratiques. L'abaissement du Parlement et le musellement de la Justice sous la Ve République ont été des vices jumeaux, n'allant pas sans gratifications. Contre cela n'existait qu'une cure: le devoir de rendre compte en public d'une liberté assumée. Cette médication, que les politiques ont commencé à éprouver et que les magistrats refusent encore, provoque des aigreurs pour lesquelles Guigou est aujourd'hui un bouc émissaire tout trouvé.

Ces deux corporatismes conservateurs, frères enne