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Libération

Exigence nue.

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publié le 8 janvier 2000 à 22h04

L'empoisonnement alimentaire est un des traits caractéristiques de

notre époque au titre de phantasme collectif récurrent. C'est la conséquence paradoxale, mais sans doute inévitable, d'une amélioration toujours perfectionnée de l'hygiène des nourritures. Ce champ de l'activité humaine est désormais soumis, lui aussi, à l'exigence du «zéro défaut». L'évolution de la listériose dans les années récentes et l'émotion qu'ont suscitée les deux récents décès aux rillettes contaminées en fournissent la meilleure illustration.

Identifié tardivement (il y a moins de vingt ans!), le danger lié à la Listeria a été pris en compte avec un succès certain par les services adéquats. Après la terrible épidémie de 1992, le recul des pathologies dues à ce bacille témoigne des progrès de la surveillance et des mesures de prévention. Pourtant, l'éradication n'est pas encore en vue et il paraît révoltant de risquer encore sa peau en avalant une tartine de fromage ou de pâté. Et cela sans même savoir si, techniquement, il existe une faute à reprocher au fabricant. Car la sensation de scandale ne provient pas d'un examen pragmatique des risques et de leur traitement mais d'une exigence nue de sécurité: le droit de vivre sans être empoisonné.

Heureusement, la vie est compliquée. Cette pétition d'asepsie clinique dans l'alimentation va de pair avec une valorisation de la «bonne bouffe» de terroir qui en est tout le contraire (qu'on s'amuse à analyser une marinade de sanglier!). Et l'exigence de sécurit