Six heures vingt, les camionnettes jaunes sont alignées dans la rue.
Les préposés commencent à charger leurs fourgons de paquets et de recommandés. A l'intérieur du bâtiment gris de la Poste du XIIe arrondissement de Paris, c'est l'heure du tri. Depuis 6 heures, les facteurs sont devant leurs casiers. Ils n'ont ni le temps de lever la tête, ni de blaguer: la masse du courrier accumulé depuis janvier casse le moral des plus boute-en-train. Dans les couloirs, les containers sont alignés contre les murs. A l'étage où les facteurs préparent leur tournée, les rebords de fenêtres disparaissent sous les plis poussiéreux. Impossible de circuler entre les gens: la moindre promenade se transforme en course d'obstacles au milieu des sacs. Dans les étages supérieurs sont entreposés des chariots pleins à ras bord de publicités. Les facteurs ne les voient même plus et se concentrent sur les lettres les plus urgentes.
Sans embauche. Pour eux, cette vision d'apocalypse n'est pas à mettre au compte de la grippe ou de la tempête, comme l'assure leur direction. «Si le courrier s'entasse, c'est parce qu'on est passé aux 35 heures en dépit du bon sens, dénonce Gilles Blondeau, du syndicat SUD-PTT. On nage en plein cauchemar alors qu'on a toujours plus de lettres à distribuer à cause de la reprise économique.» Le bureau du XIIe fait partie des sept centres de distribution parisiens, sur seize, qui bénéficient de la réduction du temps de travail. A la faveur d'une réorganisation des tournées et des