Heureuse Russie! Au moment où elle croit donner le coup de grâce à
la Tchétchénie rebelle, elle jouit d'une conjoncture exceptionnellement favorable. D'un côté, le niveau de protestation internationale à la brutalité de son action en Tchétchénie relève plus du service minimum que d'une réelle intention de peser sur les événements. Ainsi, prenant le train en marche à la suite des révélations sur le sort des prisonniers tchétchènes, le Quai d'Orsay a diffusé hier une déclaration du ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine, pressant Moscou de «mettre fin à la répression sous toutes ses formes» en Tchétchénie, «en particulier dans ce qu'on appelle les camps de filtration». Pas de quoi faire sursauter le Kremlin. Pas plus que la déclaration de l'Union européenne, la veille, plaidant pour une «solution pacifique du conflit» et condamnant l'usage d'une «force disproportionnée et indiscriminée» touchant de nombreux civils.
De l'autre, la Russie engrange des succès non négligeables. Le premier, vendredi, a fait l'effet d'une bombe: le «club de Londres» des créanciers privés de la Russie a accordé à ce pays à la gestion pourtant peu reluisante une remise d'un tiers de sa dette de 32 milliards de dollars et un rééchelonnement du reste. De quoi encourager la Russie, rapportait hier le Financial Times, à espérer que le «club de Paris» des Etats créanciers suive le mouvement et efface à son tour une partie des 42 milliards de dollars de dette à leur égard. On est loin des réactions