Jérusalem, envoyés spéciaux.
Alors que les journalistes quittent la salle, Hubert Védrine, le visage crispé, se penche vers Lionel Jospin. A voix basse et sans remarquer les micros toujours branchés devant lui, il lui signale avec un embarras non dissimulé que ses propos s'écartent de la politique française suivie jusqu'à ce jour. Le Premier ministre lui rétorque sèchement qu'il entend s'exprimer avec ses mots et sa sensibilité, loin des formules toutes faites du Quai d'Orsay. La conférence de presse, organisée dans un hôtel de Jérusalem à l'issue de la deuxième journée de sa visite en Israël, marque un tournant. Pour la première fois, le chef du gouvernement a décidé de s'émanciper des contraintes subtiles de la diplomatie française en temps de cohabitation. Et de parler «librement». Une liberté qui lui a valu vendredi soir une convocation à l'Elysée dès son retour.
Dérapage. Sans avoir prévenu son chef de la diplomatie et encore moins l'Elysée, Lionel Jospin a fait un dérapage dont il est difficile de savoir s'il est contrôlé. Dans la guerre au Liban, il vient de se ranger au côté d'Israël. En des termes jamais entendus dans la bouche d'un dirigeant français, il condamne «les attaques terroristes [du Hezbollah, ndlr] contre des soldats» israéliens. A l'inverse, il salue la retenue observée par Tsahal: «Epargner les populations civiles est une contrainte que s'efforce de respecter Israël.» Il dit pouvoir «comprendre» les «répliques» israéliennes, tout en exprimant le souhait