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Libération
Éditorial

Le théâtre du pouvoir.

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publié le 7 avril 2000 à 0h13

Beaucoup le croyaient mort depuis longtemps, tant la maladie puis

son improbable successeur l'avaient réduit au silence. Sa fin prend donc l'aspect d'une résurrection. Celle d'une Tunisie idyllique, moderne, laïque, républicaine. Tout le contraire de la Tunisie de Zine ben Ali, celle d'aujourd'hui, nécrosée par le népotisme, la corruption, l'autoritarisme et les violations systématiques des droits de l'homme sous couvert de lutte contre l'islamisme.

La comparaison est tentante, et Habib Bourguiba en sort bien sûr à son avantage. Son passé, son parcours, sa détermination, son courage étaient d'une trempe toute particulière. Sans rapport avec les tendances boutiquières et policières de celui qui occupe depuis presque treize ans le palais de Carthage.

On aurait tort cependant de trop idéaliser a posteriori celui qui s'est lui-même surnommé le «combattant suprême»: s'il fut l'artisan résolu de l'indépendance de son pays, Habib Bourguiba sombra vite dans une théâtralisation du pouvoir qui cachait de plus en plus mal de multiples échecs. Economiques certes, mais aussi politiques. Sa réforme du statut des femmes, exceptionnelle dans un pays musulman, ne suffit pas en particulier à faire oublier sa conception très particulière de la démocratie. Incarnation autoproclamée de la Tunisie, Bourguiba ne supporta jamais qu'un contre-pouvoir issu des urnes coexiste avec le sien. D'où une valse de Premiers ministres, dont aucun ne devait s'imposer et autant de changements ex abrupto de politiqu