Menu
Libération
Interview

""Les temps collectifs sont pulvérisés""

Article réservé aux abonnés
publié le 8 juillet 2000 à 2h54

Le sociologue André Rauch est l'auteur de Vacances en France, de 1830 à nos jours (1). Il analyse l'impact des 35 heures sur la relation des salariés au travail et au temps libre.

Les 35 heures vont-elles changer notre façon de prendre les vacances ?

Elles vont induire un changement profond des temporalités. Dans les années 50, lorsque les Français entrent dans ce que l'on a appelé les "Trente glorieuses", ou la société des loisirs de masse, les vacances deviennent quelque chose que l'on partage collectivement. Il y a le temps de travail et, à l'issue ce temps de travail, le week-end ou les congés annuels. Entre 7 et 9 heures du matin, tout le monde part travailler en même temps. A partir de 6 heures du soir, tout le monde repart en même temps. Les 35 heures marqueront la fin de cette temporalité collective.

L'annualisation du travail et des congés est-il facteur d'individualisme ?

Autrefois, celui qui partait en vacances à contretemps ou hors des week-ends pouvait avoir mauvaise conscience de se reposer alors que les autres travaillaient. Avec les 35 heures, les temps collectifs sont pulvérisés. On a des temporalités individualisées entremêlées de temps de travail et de coupures plus brèves que par le passé.

C'est la deuxième révolution, après les congés payés ?

C'est la deuxième fois en cent ans qu'un tel changement se produit. La première fois, pour moi, ce ne sont pas les congés payés, mais la naissance de la société industrielle. C'est elle qui va inventer le salariat et le p