Ce n'est pas une médiocre ambition des politiques que de chercher à être populaire, dès lors qu'ils y parviennent par des moyens honorables. Il y a là une juste compensation aux rigueurs du métier. Martine Aubry va quitter son poste ministériel pour briguer la mairie de Lille avec une cote d'enfer. Une popularité pareille, ça se mérite certes; mais à quoi sert au juste un capital de sympathie si on ne le met pas à l'épreuve de causes supposées difficiles?
Dans les derniers mois, sinon les dernières semaines de son ministère, Aubry avait l'occasion de faire franchir un pas décisif à la législation sur l'avortement; et voilà qu'elle y renonce. Au grand dam d'un mouvement (issu du Planning familial, des associations qui ont lutté pour les droits des femmes) profondément ancré à gauche, qui a sans doute largement contribué à l'alternance politique dans ce pays, et qui se sent trahi. C'est "son" gouvernement qui verrouille les évolutions nécessaires en matière d'IVG et qui, amertume supplémentaire, le fait avec une opinion publique prête, elle, à accepter les réformes nécessaires. C'est effectivement paradoxal qu'un ministre populaire renonce à une politique... qui n'est pas impopulaire. Mais l'on avait déjà constaté, chez d'autres, des crispations de ce type s'agissant du Pacs, voire d'une régularisation plus généreuse des sans-papiers.
Comme si, affranchis des solidarités militantes qui les ont fait accéder à leur poste, certains ministres retrouvaient des inhibitions électoralis