Au delà de la Manche, ils volent; en deça, ils sont paralysés. La contradiction est patente puisqu'il s'agit des mêmes appareils, et elle embarrasse les autorités françaises. Maintenir Concorde au sol ne revient-il pas, en effet, à reconnaître que le symbole des trente glorieuses est peut être hypothéqué depuis son origine par des défauts de conception? Au nom de l'orgueil national, on aurait donc fait prendre des risques inconsidérés pendant un quart de siècle à des centaines de milliers de voyageurs? Difficile à admettre aussi bien pour Air France que pour le gouvernement. C'est pourtant un ministre de ce gouvernement, Jean-Claude Gayssot, qui a imposé, dans l'émotion qui a suivi le crash du Concorde, à l'ex-compagnie nationale de ne plus faire voler les cinq appareils subsistant. Difficile pour lui de revenir rapidement sur sa décision: ce serait reconnaître qu'elle était essentiellement d'ordre psychologique et non pas technique; et que les responsables britanniques, qui se sont contentés d'annuler deux vols avant de les reprendre, ont fait preuve de davantage de sang-froid.
Le vrai débat qui se mène à haut niveau, pourtant, n'est plus là depuis plusieurs jours. Certes, le refus (traditionnel) des Britanniques de s'aligner sur le principe de précaution français appliqué à l'aviation, qui ne connaît pas et ne connaîtra jamais le risque zéro, il exigerait l'arrêt immédiat du transport aérien pose problème et c'est bien pourquoi les Français sont à la recherche d'une con