Allez donc voter. Vous avez bien dix minutes à perdre... L'ultime argument brandi jeudi soir par Jacques Chirac, pour inciter ses concitoyens à se comporter en citoyens, laisse pantois et mérite d'entrer dans l'anthologie de la désinvolture en politique. D'autant que le président de la République n'en était pas à son coup d'essai en matière de dédramatisation de la politique. N'avait-il pas déjà laissé entendre, lors de la présentation de son projet référendaire, qu'il s'accommoderait de la réponse des Français, qu'elle soit oui, qu'elle soit non? C'est ce qu'on appelle à l'Elysée la nécessaire relativisation des enjeux à l'heure où la France entrerait dans la phase «apaisée» de la démocratie. C'est en vertu de ce nouveau concept, suggère-t-on dans l'entourage présidentiel, qu'il ne faudra pas, demain soir, déplorer un taux record d'abstention. Le même phénomène ne sévit-il pas depuis belle lurette aux Etats-Unis, sans qu'on songe à mettre en doute le caractère démocratique de ce pays? Un tel discours, repris en partie par les responsables socialistes, est d'abord opportuniste. Il est ensuite faux puisque le fort abstentionnisme américain s'explique en grande partie par des raisons spécifiques, notamment par la très grande mobilité de la population. Il est enfin dangereux car on ne fait pas de la politique de la même façon qu'on commet des escroqueries: en catimini. C'est pourtant, de Jacques Chirac à Lionel Jospin sans oublier le déclencheur de l'opération quinquennat, Valé
Éditorial
Dix minutes à perdre.
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par Jacques AMALRIC
publié le 23 septembre 2000 à 4h39
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