Parce qu'une bande de trente jeunes en keffieh a été vue vendredi soir par de nombreux fidèles, la peur hante les esprits des juifs du XIXe arrondissement de Paris. Samedi, pourtant, les juifs du quartier comme le reste de la communauté auraient dû être en fête. Comme chaque année, une semaine après le Grand Pardon (Kippour), le calendrier liturgique est marqué par la fête des Cabanes (Soukot). Une célébration normalement empreinte de liesse, contrairement à Kippour, puisqu'il s'agit de commémorer la libération des Hébreux après des années de servitude en Egypte. Une fête rehaussée de chants et de goûters savoureux auxquels les enfants participent activement. Dans ce fief du renouveau de piété juive qu'est devenu le XIXe arrondissement, ce petit Jérusalem-sur-Seine (lire Libération du 17 septembre 1999) où sont concentrés près de 40 000 juifs (sur 350 000 en Ile-de-France), plutôt fervents, autour de nombreux commerces cachères et d'une trentaine de synagogues, la fête aurait dû déteindre sur tout le quartier. Cette année, l'angoisse a remplacé la joie. Et, à la place des mères de familles nombreuses emperruquées, promenant leurs poussettes dans les allées des Buttes-Chaumont, seuls les joggeurs et les vieux du quartier déambulent. Du côté de l'avenue Secrétan et de la rue Petit, c'est le ballet des voitures de police. Egarés, un plan à la main, les hommes en uniforme cherchent à dénicher un oratoire discret, tapi dans un entresol.
«On vous crèvera tous.» A cause de l'actuali