Jusqu'au bout, le général Robert Gueï aura été aussi empressé de donner sa parole que de ne pas la tenir. Au lendemain de son coup d'Etat, en décembre 1999, il avait déclaré, la main sur le coeur: «Je suis venu balayer la maison, le pouvoir ne m'intéresse pas.» Vendredi, à quarante-huit heures de l'élection présidentielle à laquelle il s'était néanmoins porté candidat, le «général-président» avait promis à la nation, dans un discours radiotélévisé, qu'il respecterait le verdict des urnes. Enfin, hier matin, l'auteur du hold-up électoral qui avait provoqué un soulèvement populaire a assuré à l'archevêque d'Abidjan, Mgr Agré, qu'il éviterait un bain de sang. Puis, retranché dans sa présidence, le général Gueï a ordonné au dernier carré de ses fidèles d'ouvrir le feu à vue...
Selon les circonstances et ses intérêts personnels, cet ancien de Saint-Cyr a tantôt brutalement réprimé la fronde sur le campus universitaire au prix d'étudiants défenestrés , tantôt refusé la réquisition de l'armée pour le maintien de l'ordre. «Il n'a pas de parole, c'est un fieffé menteur», dit de lui un frère d'armes qui le connaît de longue date. En 1990, ce dernier avait prévenu le président Félix Houphouët-Boigny, qui avait fait appel à Gueï au détriment d'autres militaires plus anciens et plus gradés: «Gueï est cupide, il vous trahira», lui avait-il dit. «S'il aime l'argent, je lui remplirai les poches», avait répliqué le premier président de la Côte-d'Ivoire. Nommé à la tête de l'armée, Gueï n'a