Lecteurs, autant que vous le sachiez: si Jacques Chirac se sent «blessé» et se vit comme «une victime permanente», c'est surtout la presse qui en est responsable. La presse qui transformerait en «justice-spectacle» l'indispensable travail des juges. La presse qui atteindrait «directement la démocratie» en nourrissant la vieille et dangereuse fable du «tous pourris»...
L'argument n'est pas nouveau. Il est même usé jusqu'à la corde, tant il a été utilisé au profit de mauvaises causes. C'est celui-là, par exemple, que les autorités françaises brandissaient à la fin des années 50, avec la censure ou l'interdiction de paraître en prime, pour faire taire les publications qui dénonçaient l'usage de la torture en Algérie. Seule différence: on ne prétendait pas, en ces temps-là, vouloir protéger la démocratie mais on invoquait la nécessité de préserver l'honneur et le moral de l'armée française. Avec de tels antécédents, on pourrait croire la ritournelle antipresse définitivement disqualifiée, méritant au mieux un haussement d'épaules. Mais ce n'est pas le cas et ceux qui entonnent le chant de l'indignation le savent bien: attaquez la presse, surtout lorsque vous êtes à bout d'argument, il en restera toujours quelque chose, ne serait-ce qu'un bouc émissaire. D'abord parce qu'il lui arrive de se tromper et de manifester parfois quelque arrogance. Mais surtout parce que la garce s'est fait tant d'ennemis au fil des lustres en s'intéressant aux dysfonctionnements en tous genres et en les