C'est un «NON» écrit en lettres majuscules. Par un auteur encore inconnu. Un non qui figure sur la première page d'un rapport rédigé, en 1984, par le gendarme Christian Jambert. Alors que personne ne s'y intéresse, cet adjudant cherche, durant des mois, la trace de six (1) handicapées mentales placées dans des établissements spécialisés de l'Yonne, six jeunes filles qui ont disparu entre 1977 et 1979. Il transmet son rapport au parquet d'Auxerre (2). L'enquête est fouillée: Jambert retombe toujours sur Emile Louis. Plus de seize ans après, le 14 décembre 2000, Emile Louis, arrêté à Draguignan, reconnaît les meur tres de ces jeunes fil les (3). Preuve que le travail de Jambert méritait l'attention. Pourtant, au parquet d'Auxerre, l'enquête de 1984 a bel et bien été enterrée. Pourquoi? Que s'est-il passé dans ce palais de justice, ce «palais des mystères» comme on le dit dans la région?
Depuis l'arrestation d'Emile Louis, l'Inspection générale des services judiciaires, saisie par la garde des Sceaux Marylise Lebranchu, enquête sur les dysfonctionnements répétés de la justice à Auxerre, ces vingt dernières années. Ses conclusions ne sont pas encore connues. Sans attendre ses résultats, Libération a tenté de comprendre, auprès des nombreux magistrats qui se sont succédé à Auxerre, les moments clés de cette affaire. Une certitude: les ratés de la justice sont invraisemblables. Ils permettront certainement aux familles des victimes de rechercher la responsabilité de l'Etat. Elles y