Femmes violées et enfants battus ou à l'inverse femmes battues et enfants violés, depuis de longues années ces souffrances intimes ne sont plus taboues. La chape de silence qui pesait sur les victimes et protégeait leurs agresseurs s'est peu à peu fissurée puis allégée. Pourtant, la vigilance qui semblerait désormais aller de soi n'est pas toujours au rendez-vous. Les deux principales institutions par lesquelles des enfants et des adultes sont mis en contact, l'Education nationale et l'Eglise catholique, ont l'une et l'autre pris des positions claires contre le préjugé corporatiste qui poussait à «couvrir» un de leurs membres suspect d'actes pédophiles. Mais cette rigueur nouvelle met longtemps à se diffuser de haut en bas, des hautes sphères ministérielles ou épiscopales aux clercs qui oeuvrent sur le terrain.
Cette culture du silence, si enracinée soit-elle, est contre-productive. Loin d'écarter les soupçons, elle les multiplie. Elle peut, dans le pire des cas, déboucher sur une paranoïa purificatrice, comme on l'a vu l'été dernier en Grande-Bretagne quand on a assisté à un début de chasse aux sorcières pédophiles. Une basse presse démagogique avait en l'occurrence orchestré cette poussée de fièvre. Mais cette presse n'a pas inventé la frustration ressentie dans le public devant des enquêtes qui avaient montré la longue tolérance, parfois aux franges de la complaisance, de certains milieux éducatifs.
L'affaire de Cormeilles est exemplaire, et d'abord par le témoignage du dur