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Libération
Éditorial

Loi du coeur

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publié le 19 février 2001 à 23h01

Maintenant qu'ils ont été soignés et nourris, il reste à trancher une question infiniment plus compliquée que les problèmes d'intendance: que faire des damnés de la terre débarqués sur la Côte d'Azur? La loi du coeur commande bien sûr de les accueillir. Mais, dans ces affaires d'immigrations, les sentiments, depuis longtemps, ne pèsent pas lourd face aux considérations d'opportunité politique.

Le trafic d'êtres humains est un des secteurs en développement de la criminalité organisée. L'échouage de l'East Sea est la preuve que les réseaux ont acquis une capacité de taille quasi industrielle, bien loin des tentatives bricolées de risque-tout qui tentent leur chance à travers le Rio grande, le détroit de Gibraltar ou celui de Messine. En outre, il est établi que la Turquie sert de plaque tournante à une bonne partie des réseaux d'infiltration en direction de l'Europe, ce dont le gouvernement turc ne se soucie guère. Accueillir les Kurdes de l'East Sea reviendrait donc à encourager la mafia et le pouvoir turc, mais aussi, plus généralement, l'immigration clandestine.

Pourtant, ces raisons sont moins solides qu'elles ne peuvent paraître. D'une part, les mafiosi se fichent du sort des malheureux qu'ils trimbalent en leur faisant payer le prix fort. D'autre part, si l'Europe doit faire pression sur la Turquie pour qu'elle adapte sa conduite pratique à sa candidature à l'UE, ce n'est pas en sanctionnant quelques centaines de Kurdes qu'on y parviendra.

Comme il n'est possible de renvoye