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Libération

Claude Simon «Admirable de lucidité»

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publié le 13 avril 2001 à 0h28

Claude Simon a été le deuxième prix Nobel de la maison en 1985.

«Ce n'est pas seulement l'éditeur, mais pour moi un grand ami qui disparaît, et il me semble à peine croyable que quelqu'un d'aussi vivant, d'aussi vital, soit mort. C'est Alain Robbe-Grillet qui, ayant lu mon manuscrit du Vent, m'a présenté à Jérôme Lindon. Le livre fut publié en 1957. Plus de quarante ans d'amitié donc, avec cet homme admirable de lucidité, de rectitude. Il y avait en lui quelque chose de pudique et de très ouvert à la fois. Il a eu tout du long du courage. Je me souviens des manifestations auxquelles avec lui je participais pendant la guerre d'Algérie. Mais surtout de son inlassable courage de passer des années à publier des livres que peu de monde lisait. Sa faculté d'attention était magnifique. Entre le moment où je lui remettais un manuscrit et le moment où il m'appelait pour me dire qu'il l'avait lu et relu, il ne s'écoulait jamais guère plus de trois jours. Il proposait quelques corrections, de détails, toujours judicieuses, mais infimes. A mes yeux, cet homme, qui ne parlait jamais beaucoup de lui-même, a été un génie de l'édition. Je revois sa silhouette longue monter et descendre les étages des Editions de Minuit. Je nous revois dans sa maison d'Etretat, où souvent nous sommes allés. C'est à un dîner chez lui que j'ai rencontré, en 1962, ma femme, Réa. Il nous a rendu plusieurs fois visite à Salses; nous allions marcher des heures dans les Corbières. Sa vigueur physique était aussi imp