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Libération
Éditorial

Ambiguïtés

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publié le 18 mai 2001 à 0h54

On comprend mal comment une loi de 1986 visant à contrôler les bétonneurs, qui était appliquée avec beaucoup de laxisme en Corse, deviendrait rigoureuse dès lors qu'on l'assouplit avec une série de dérogations. Et qu'on ne vienne pas nous dire que les élus locaux devront veiller à ce que les bornes ne soient pas franchies! Ce sont les mêmes qui trouvaient de bonnes raisons pour s'asseoir sur les règlements en vigueur qui auront à apprécier l'opportunité des choix. Bien sûr, l'on peut compter sur des élus intègres (ils l'étaient déjà avant) et sur des associations vigilantes (elles l'étaient aussi), mais qui peut croire que les députés les ont aidés en votant la corsisation de la loi littoral?

On est au coeur des ambiguïtés du projet issu des accords Matignon: derrière l'audace «girondine» de la réforme se faufilent des opportunismes politiques et économiques locaux qui ont faiblement à voir avec l'intérêt général. Certes, il n'y a aucune raison de décider depuis Paris ce qui pourrait l'être à Ajaccio ou à Bastia. Mais, alors que le ministre de l'Intérieur laisse entrevoir une extension du modèle corse à d'autres régions, il n'est pas interdit de s'interroger sur la portée pratique de certains transferts de pouvoir. Il ne s'agit pas de crier à la décadence de la République à chaque fois que l'on ouvre des brèches dans le jacobinisme, mais il reste que certaines abstractions lyriques en matière de décentralisation peuvent friser la naïveté, quand ce n'est pas, pour d'autres, le